Middle East Watch

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Opération "Plomb durci" : quelle "victoire" pour Israël ?

Le Monde

lundi 23 محرم 1430

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"L’opération Plomb durci a atteint ses objectifs et même au-delà", a assuré le premier ministre israélien, Ehoud Olmert après l’annonce d’un cessez-le-feu israélien unilatéral. Le quotidien populaire Maariv a titré en "une", sur la "Victoire". Les tankistes de Tsahal, juchés sur leurs Merkava ont fait le "V" de la victoire en quittant leurs positions avancées. Mais le cessez-le-feu israélien était à peine entré en vigueur que des roquettes tombaient sur Israël, avant la trêve du Hamas.
Youval Diskin, chef du Shin Bet (sécurité intérieure), a indiqué que "le Hamas pourra reconstruire les tunnels en quelques mois et recommencer à faire de la contrebande d’armes". Et l’armée estime que seulement la moitié d’entre eux (environ cinq cents) a été détruite. "Nous n’avons rien obtenu des objectifs annoncés lors du déclenchement de l’opération lancée le 27 décembre", a aussitôt proclamé le numéro deux du Likoud, Silvan Shalom, un parti qui a annoncé son hostilité à la décision unilatérale de mettre fin aux combats.
Nombreux sont ceux qui ont déjà reproché au gouvernement de n’avoir pas pu libérer le caporal Gilad Shalit, séquestré depuis le 25 juin 2006 dans la bande de Gaza. Comme l’a fait remarquer Nahum Barnea, éditorialiste d’Yediot Ahronoth : "Le consensus national qui a prévalu en Israël pendant vingt-deux jours est mort le soir du cessez-le-feu."
A quoi donc a servi l’opération "Plomb durci" si, au bout du compte, aucun des objectifs recherchés n’a été accompli et si, en plus, le prix payé par l’Etat juif sera beaucoup plus élevé qu’il ne l’imagine en terme d’image ? Outre le Vénézuela et la Bolivie, la Mauritanie a décidé de suspendre leurs relations diplomatiques. Le Qatar va fermer le bureau commercial israélien à Doha. Bachar Al-Assad, le président syrien, a affirmé qu’un plan de paix saoudien adopté par les vingt-deux Etats arabes, en mars 2002, à Beyrouth était désormais caduc. La Turquie, dont le premier ministre Racep Tayyip Erdogan, a tenu des propos très durs vis-à-vis d’Israël, a décidé de ne plus jouer les bons offices dans les pourparlers avec la Syrie.

LE HAMAS ÉBRANLÉ, MAIS TOUJOURS BIEN VIVANT

Mahmoud Abbas, président de l’Autorité palestinienne et partenaire de négociations d’Israël, a été considérablement affaibli par cette guerre meurtrière et destructrice qui, si elle a amoindri les capacités militaires des islamistes, n’a pas permis d’en éliminer les cadres, à part deux d’entre eux. Si les chiffres de 15 000 à 20 000 combattants sont exacts, 500 à 600 d’entre eux auraient péri dans les combats, le reste étant constitué par des victimes civiles. La plupart étaient retranchés au cœur des villes, là où Tsahal ne s’est pas vraiment aventuré.

Si le Hamas a été ébranlé par cette offensive, le mouvement de la résistance islamique est toujours bien vivant. Sa capacité de résistance en fait, plus que jamais, une organisation incontournable, même si les Israéliens et le monde occidental refusent toujours de parler avec ses dirigeants. En saluant le cessez-le-feu israélien par une salve de roquettes avant d’appeler par la suite à une trêve d’une semaine pour faciliter l’acheminement de l’aide humanitaire et la poursuite de négociations pour aboutir à une solution concertée pour la réouverture des points de passage, le Hamas a d’ailleurs voulu signifier qu’il ne pouvait y avoir de solution durable à Gaza sans lui et que la fin du blocus du territoire restait pour lui une priorité.

N’en déplaise à Ehoud Olmert, qui a affirmé que "la force du Hamas allait décroître", ces trois semaines de guerre risquent d’accroître son audience au sein de la population palestinienne, même si beaucoup de commentateurs estiment qu’il a commis une grossière erreur en ne reconduisant pas la trêve qui prévalait depuis juin, le 19 décembre 2008.
M. Olmert se dit fier d’avoir restauré la capacité de dissuasion de Tsahal après les manquements révélés par la deuxième guerre du Liban de l’été 2006. Mais Ahmad Aboul Gheit, ministre égyptien des affaires étrangères, critiquant le 17 janvier "l’intransigeance israélienne", a dénoncé pour sa part "un pays ivre de puissance et de violence".
M. Olmert a eu beau s’ingénier à dire "qu’Israël avait démontré une grande sensibilité en exerçant sa force de manière à éviter, autant que possible, de toucher les victimes civiles non impliquées dans la terreur". L’usage de canon de char et de l’artillerie lourde sur des zones surpeuplées, a contredit cette affirmation. "Israël, qui voulait être une lumière pour les nations, est aujourd’hui fière d’avoir adopté l’échelle de valeurs de Vladimir Poutine. Si c’est cela la victoire, malheur aux vainqueurs", écrit Ofer Shelah dans Maariv.


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